Guerre en Ukraine et réactions
des différents états
C’est un monde aux complexités toujours renouvelées qu’éclaire le conflit en Ukraine et, pour le décrypter, les déjeuners d’ARRI et les voyages que nous organisons se révèlent plus utiles que jamais.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie, passée sous silence lorsqu’il ne s’agissait que de la Crimée, a réveillé l’Occident face à l’agression d’un pays européen par un membre du Conseil de sécurité des Nations-Unies. L’Union européenne s’est mobilisée comme rarement et s’est jointe aux États-Unis pour soutenir l’Ukraine agressée et l’aider à recouvrer sa complète souveraineté. Mais le soutien au pays agressé n’a pas réuni l’unanimité dans le monde. Dès le 2 mars 2022, lors du premier vote de l’ONU pour condamner la guerre en Ukraine, trente-cinq États se sont abstenus, dont la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Sénégal, quand cinq - dont la Russie - s’y sont opposés. Le 7 avril 2022, ce sont cinquante-huit États qui ont refusé de participer au vote visant à exclure la Russie du Conseil des droits de l’Homme des Nations-Unies après le massacre de Boutcha. Le récent sommet du G7 à Hiroshima, en mai 2023, où avait été invités des États du Sud global et auquel s’est joint in extremis le président ukrainien, a encore illustré certaines oppositions au soutien à l’Ukraine, notamment celle du président récemment élu du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva.
Cet éloignement de la coalition soutenant l’Ukraine a parfois été analysé comme l’expression d’une opposition latente du Sud à l’Occident. Mais la position de ces États est-elle homogène et dirigée contre un monde régi par le droit international ? Rien n’est moins sûr. Certes certains soutiennent clairement l’agression russe en raison d’un alignement ou d’une proximité d’approche politique avec la Russie, consacrant la force, qu’elle soit mise en œuvre au plan interne ou dans les relations extérieures, comme unique source de légitimité. Il en va ainsi de la Biélorussie, mais aussi de la Syrie, de la Birmanie, du Venezuela, de Cuba, de l’Iran ou sans doute aussi de la Chine. La place ambiguë occupée par l’Arabie saoudite, tient sans doute, pour une part, à la volonté de son Premier ministre de retrouver une place, quelle qu’elle soit, au plan international, après la mise au ban que lui a value l’affaire Khashoggi.
Mais à côté de ces soutiens assumés, nombre d’États ne sont mus que par la défense de leurs intérêts propres, couplée à une grande indifférence au sort de l’Ukraine. C’est ainsi que l’Inde, vieux pays non-aligné, a pu d’une part profiter de manière conjoncturelle de la possibilité d’acheter du pétrole russe bradé sans se préoccuper outre mesure du moyen qu’elle offrait ainsi à la Russie de contourner les sanctions auxquelles celle-ci doit faire face, et se doit d’autre part de ménager un État qui est son principal fournisseur d’armes alors même qu’elle s’estime menacée par la Chine et le Pakistan. De même, la position attentiste de nombreux États africains tient, pour une part, aux conséquences de ce conflit lointain sur des approvisionnements en produits agricoles dont ils sont très dépendants, en raison des sanctions imposées à la Russie et du blocus imposé par la Russie à l’Ukraine.
Dans d’autres zones, là encore bien éloignées du théâtre européen, ce sont des positions politiques locales qui déterminent la position adoptée face au conflit. Ainsi, en Amérique latine, c’est la posture de chacun face aux États-Unis qui se prolonge par un soutien à Moscou ou à l’Ukraine et l’on parvient ainsi à des situations défiant toute logique qui voient la gauche, par antiaméricanisme historique, dénier son soutien à l’Ukraine pour ne pas rejoindre le camp américain, quitte à soutenir le gouvernement d’extrême droite de la Russie. D’une certaine manière, la position du Sénégal, qui affiche sa neutralité pour ne pas se mettre dans le sillage de la France, ancienne puissance coloniale, peut être rapprochée de cette situation.
Enfin, le cas de l’Afrique du Sud, mise en cause pour avoir livré des armes à la Russie, doit probablement se lire dans le cadre des affaires de corruption qui avaient contraint au retrait le prédécesseur du président Ramaphosa, le président Zuma, membre du même parti, notamment à propos de la signature d’un accord nucléaire avec la Russie.
Finalement, des raisons variées peuvent conduire des États à ne pas rejoindre la majorité dans le soutien à l’Ukraine face à l’agression russe. Cette variété ne permet de voir dans ces États un bloc qui prendrait volontairement le contrepied d’un Occident au contraire uni par des valeurs claires dans la défense de l’ordre du droit international mis en place à l’issue de la Seconde Guerre mondiale et qui sait encore réunir largement autour de ces valeurs.
Je vous donne rendez-vous lors de nos prochaines rencontres pour prolonger ensemble, autour de nos intervenants, les échanges de point de vue sur toutes les questions qui agitent notre monde.
David Capitant
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